Jeu vidéo et Biologie - Stickology

- la Science du Jeu Vidéo, par Aurionis

Test de Duke Nukem Forever (X360 - PS3)



Qui l'eut cru ? L'arlésienne la plus célèbre du jeu vidéo est finalement sortie pour de bon, après pas moins de quatorze années de gestation ! En effet, depuis 1997, les annonces et reports se sont succédés, à tel point que l'on crut le projet mort et enterré à de nombreuses reprises. Mais même la fermeture du studio qui le développait depuis le début, 3D Realms, n'est pas parvenue à empêcher la sortie de Duke Nukem Forever, repris en main in extremis par Gearbox. Devant un parcours aussi tumultueux, nombreux sont ceux qui doutaient de la qualité finale du titre. À tort ou à raison ?

Ah, quel bonheur de retrouver le Duke ! Toujours aussi bodybuildé, toujours aussi macho, et considéré comme le plus grand héros de l'humanité depuis qu'il a repoussé une énième attaque extraterrestre, il coule des jours heureux dans son luxueux building, entouré de jeunes et jolies demoiselles. Duke va cependant devoir sortir de sa retraite dorée : les aliens sont de retour, plus nombreux et belliqueux que jamais ! Non contents d'envahir la Terre, ils enlèvent toutes les jeunes femmes... Duke en fait une affaire personnelle, et reprend les armes avec un seul objectif : botter le cul à ces enfoirés d'aliens ! Le scénario tient volontairement sur un post-it et parodie allégrement les films d'action des années 80, Duke endossant le rôle du héros patriote, chargé en testostérone et peu prompt aux discussions inutiles, un personnage cliché qu'ont interprété des Stallone ou des Schwarzie en leur temps.

La série en a fait une marque de fabrique depuis plusieurs années, et Duke Nukem Forever cultive cet esprit décalé avec brio. Toujours aussi vanneur, le Duke ne perd pas une occasion de lancer une vanne acerbe. Les habitués de la série retrouveront avec plaisir des « Come get some ! » ou des « It's time to kick ass ! », tandis que les néophytes découvriront avec plaisir ce personnage au combien attachant, dont le comportement misogyne et tellement viril fait tout le charme. Pour ce nouvel épisode, Duke a agrandi sa collection de répliques (en quatorze ans, il a eu le temps), et c'est à un véritable festival de catch-phrases que se livre notre héros, pour le plus grand bonheur du joueur. De même, les plus attentifs découvriront de nombreuses allusions et références à d'autres jeux vidéo, faisant l'objet de quelques remarques de Duke. Il jugera ainsi, lorsqu'on lui conseille de porter une armure issue de Halo, que « les armures, c'est pour les tapettes » ! Pour parfaire ce tableau et rester fidèle aux principes de la série, Duke Nukem Forever propose un vaste choix de babes, histoire d'émoustiller les plus fripons d'entre nous. Le pari semble réussi : l'esprit Duke Nukem règne sur le titre de 3D Realms.

Malgré cette ambiance, c'est bel et bien sur le gameplay que se juge un jeu. Et c'est là que les ennuis commencent pour le Duke... Ceux qui espéraient voir en DNF une suite spirituelle de Duke Nukem 3D vont déchanter, car loin de proposer des niveaux ouverts, regorgeant de passages cachés et autorisant toutes les folies, le jeu s'inspire des FPS modernes pour un résultat peu convaincant. Commençons par les armes, puisque désormais le Duke ne peut porter que deux armes à feu. Une restriction de l'inventaire qui ne plaira pas à tout le monde. Le choix se révèle pourtant plutôt fourni, et fidèle à ce que proposaient les anciennes aventures de notre héros. On trouvera par exemple le fusil à pompe, le lance roquettes, le railgun, et il sera également possible de récupérer les armes des adversaires vaincus. Cependant, cet arsenal de qualité ne comblera pas le joueur pour la raison simple que la visée à la manette est des plus délicates. Sans indicateur ni réticule de visée, toucher un adversaire, surtout de loin, relève de la gageure. La touche traditionnellement attribuée à la visée effectue un simple zoom en avant, bien peu utile... En plus de ces armes, Duke a en sa possession des mines et des grenades (que l'on activera nous-même) et ses items favoris lui octroyant divers bonus de résistance et de puissance : la bière, les stéroïdes et le fameux holoduke.

Si l'action est présente, Duke Nukem Forever frappe également par des passages où les fusillades laissent place à l'exploration ou à la plate-forme. Ainsi, la première demi-heure de l'aventure se fait dans un calme (et un ennui) auxquels la série ne nous avait pas habitués. À plusieurs reprises dans l'aventure, Duke sera rapetissé, l'occasion pour lui de sauter d'étagère en étagère et de se frotter à des rats devenus plus gros que lui. Ces phases, bien qu'originales, sont assez délicates à jouer, la faute à des sauts difficiles à appréhender. Enfin, notre quête nous permettra de prendre le volant d'un buggy, lancé à fond sur l'autoroute ou déambulant dans des canyons arides. La conduite, simple et à moitié efficace, n'apporte rien d'intéressant à l'aventure, et c'est avec un certain soulagement que l'on accueille les séquences de FPS plus traditionnelles pendant lesquelles il faudra trouver de l'essence, le réservoir de notre véhicule ne dépassant apparemment pas le litre. Tout au long de ses péripéties, Duke voyagera de la ville au désert, en passant par le fast-food ou la ruche des aliens. Seulement voilà, malgré l'originalité de certains environnements, l'ensemble fait preuve d'un level design extrêmement pauvre, à base de couloirs et de pièces parfois plus grandes, théâtres d'affrontements plus complets. Loin du bondissant Duke Nukem 3D, cet épisode rate le coche.

Soulevons maintenant l'un des grands problèmes de Duke Nukem Forever : sa difficulté. Les ennemis (aliens et porcoflics pour la plupart), s'ils ne sont pas très malins, frappent plutôt fort. Le souci vient davantage de la barre de vie de Duke, ici renommée barre d'ego. Pour augmenter la taille de cette barre, Duke devra flatter son ego en se regardant dans un miroir, en signant un autographe, en battant un record au flipper, en soulevant des haltères... Tout est bon pour accroître notre barre de santé, et l'idée est vraiment intéressante et pousse à interagir avec les éléments du décor. Malgré tout, notre santé diminue énormément à chaque coup reçu, si bien que le grand Duke mettra pied à terre après seulement quatre ou cinq contacts avec des ennemis qu'il aura toute la peine du monde à viser. Un défaut qui, bien que présent dans toutes les phases de tir, brille surtout lors des affrontements contre les boss, gigantesques, dont les attaques sont souvent fatales. Heureusement (?), notre santé se régénère d'elle-même, un autre emprunt aux FPS modernes.

Notons que le jeu dispose d'un mode multijoueur en ligne, devenu obligatoire pour les FPS de nos jours. S'il permet de passer un bon moment entre joueurs, reconnaissons qu'il pâtit des mêmes défauts que le solo, à commencer par une maniabilité peu précise. Les armes apparaissent à des points fixes, à moins que l'on préfère se battre à mains nues. Les modes de jeu, s'ils ne révolutionnent pas le genre, sont efficaces et décalés, à l'image du Duke. Ainsi, on ne participera pas à des captures de drapeau, mais bel et bien à des captures de babes ! Les environnements proposés sont assez vastes, et les joueurs aguerris de DN3D retrouveront avec bonheur le célèbre niveau Hollywood Holocaust.

Le gameplay ne convainc donc pas, et il en va de même pour les graphismes. Si un développement de quatorze ans ne pouvait laisser présager d'une prouesse à ce niveau-là, avouons tout de même que l'on pouvait s'attendre à bien mieux. Le jeu a bien du retard techniquement, tant au niveau des personnages (quoique les formes des babes ont subi un soin tout particulier) que des décors, dont les retards d'affichage sont proprement hallucinants. De même, les animations ne sont pas impressionnantes, même si celles des ennemis s'en tirent correctement. Que dire en revanche de celles de Duke, que l'on pourra admirer dans les miroirs ? Raide comme un piquet, notre héros fait peine à voir... Finissons-en sur l'aspect technique en abordant les temps du chargement du jeu, à la fois nombreux et incroyablement longs, à moins d'installer le jeu. Couplés à une difficulté qui oblige souvent à recommencer le niveau (et donc à subir un nouveau chargement), ils deviennent rapidement la bête noire du joueur.

Enfin, abordons la bande-son de Duke Nukem Forever, qui nous propose des morceaux rock parfois repris des opus précédents, pour un résultat satisfaisant. Notons que pendant les niveaux, il faudra souvent faire sans, et que l'on finira par s'ennuyer ferme. Restent les répliques savoureuses de Duke, doublé en français par Daniel Beretta, qui rend une copie plutôt propre bien que peinant à restituer le ton et les vannes de la VO. Une version anglaise absente des options, qui impose de modifier la langue de sa console si l'on veut en profiter. Un comble quand on sait que c'est la version originale qui fait toute la célébrité du Duke ! On retrouvera alors la voix testostéronée et reconnaissable entre mille de Jon St John.

Voilà qui conclut ce test de Duke Nukem Forever, un titre qui aura suscité énormément d'attente et d'engouement, pour un résultat qui en décevra plus d'un. Loin de convaincre, le titre de 3D Realms et Gearbox se montre imprécis, assez mou, dépassé techniquement... Le constat est sans appel : Duke a perdu de sa superbe, bien que l'ambiance qui émane du titre soit fidèle à la série. Le jeu a au moins le mérite de remettre Duke Nukem sur le devant de la scène, et de préparer le terrain à de futures aventures de notre héros, plus réussies espérons-le. En attendant que sortent ces éventuelles suites, on ne saura que vous conseiller de retourner sur Duke Nukem 3D pour apprécier ce qu'était Duke Nukem à son apogée, et d'éviter cet épisode qui, sans le charisme de son personnage principal, ne serait qu'un FPS fade comme il en sort tant d'autres.

Ma note : 9/20

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