Il aura suffi de deux épisodes pour
que la série Streets of Rage devienne incontournable dans le domaine
du beat them all (« tape-les tous », en bon français).
Sega n'allait bien évidemment pas s'arrêter en si bon chemin et
dota sa Megadrive d'un troisième épisode, sorti en 1994. Un épisode
particulier, faisant le pari ambitieux de clore en beauté le
triptyque de la Team Shinobi sur la console 16 bits. Une lourde
tâche. Trop ?
CHRONIQUE D'UNE DÉCEPTION
Décidément increvable, le terrible
Mr. X est de retour, plus que jamais désireux de faire main basse
sur la ville. Pour mener à bien son diabolique projet, le leader du
syndicat du crime n'a pas lésiné sur les moyens : il est désormais
à la tête d'une armée de robots et entend remplacer les dirigeants
de la ville par ses cyborgs ! Alertée par son ami le Dr Zan, la
jolie Blaze réunit une nouvelle fois une équipe de justiciers pour
débarrasser une bonne fois pour toutes les rues de ce fléau. On
pourra donc incarner quatre personnages, à savoir Axel,
indéboulonnable héros de la série, Blaze, le jeune Skate, présent
dans le deuxième épisode, et le Docteur Zan, un petit nouveau.
Lui-même cybernétique, Zan officiera en tant que gros bras de
l'équipe et proposera une jouabilité particulière sur laquelle
nous reviendrons d'ici quelques lignes. Chacun de ces protagonistes a
bien entendu des caractéristiques qui lui sont propres. À noter que
deux personnages bonus peuvent être débloqués, personnages dont on se gardera
bien de dévoiler l'identité !
Streets of Rage 3 reprend peu ou prou
le gameplay de son prédécesseur, et on aurait tort de s'en
plaindre. Tous les mouvements désormais bien connus sont présents,
et on distribuera des coups de poings par centaines, enchaînera les
projections et multipliera les sauts avec un plaisir non dissimulé.
Cependant, quelques nouveautés font leur apparition, et ont mine de
rien leur importance. Désormais, tous les personnages peuvent courir
en donnant simplement deux accoups vers l'avant ou l'arrière, un
mouvement auparavant réservé à Skate. De la même manière, il est
maintenant possible d'effectuer une roulade d'esquive vers le haut ou
le bas, ce qui s'avère bien pratique pour se dépatouiller d'une
situation délicate. Si l'attaque spéciale est toujours présente,
elle bénéficie d'une légère refonte, puisqu'elle dépend d'une
petite jauge qui se remplit d'elle même. Si la jauge est pleine,
l'attaque ne puisera pas dans la santé de notre personnage. Sinon...
gare à vos points de vie !
Il est toujours possible de ramasser
des objets et des armes, avec là encore quelques innovations : de
nouvelles armes sont accessibles (à l'instar de la planche en bois)
mais, surtout, celles-ci disposent désormais d'une barre de
résistance. Une utilisation répétée de votre tuyau favori le
verra forcément se briser (ce n'est pas sale). Ce qui nous amène au
personnage de Zan, dont la nature robotique lui confère un pouvoir
intéressant : lorsqu'il ramasse une arme, celle-ci se transforme en
boules d'énergie à envoyer sur ses adversaires. Une compétence
couplée à des bras extensibles, qui font de Zan un personnage des
plus agréables à utiliser. Pour le reste, c'est du très classique
! Dans la grande tradition du beat'em all, Streets of Rage 3 nous
promène à travers des stages urbains toujours aussi fournis en
punks belliqueux. On remarquera cependant que les niveaux sont un peu
plus longs que précédemment. En contrepartie, ils sont moins
nombreux : comptez sept stages en tout, pas un de plus. Pire encore,
en jouant en mode facile, le titre de Sega ne vous proposera que cinq
niveaux en tout et pour tout : pour jouer tous les niveaux et
assister à la « vraie » fin du jeu, il faudra
sélectionner une difficulté supérieure. Et ce ne sera pas une
mince affaire, Streets of Rage 3 étant visiblement plus difficile
que ses prédécesseurs. En sus d'ennemis plus coriaces, vous aurez
aussi droit à des phases plus originales, telle cette course contre
une pelleteuse prompte à vous aplatir. Votre manette risque de
chauffer !
LE DÉLIRE DE L'ARTISTE
Avant d'aller plus loin, mettons-nous
d'accord : avec son gameplay simple et efficace, Streets of Rage aurait pu
n'être qu'une série de beat'em all de plus, dispensable et vite oubliée. Son
succès lui vient avant toute chose de son univers particulier, à
l'ambiance soignée, ceci passant tant par les graphismes que par la
bande-son. Les deux premiers épisodes étaient de ce point de vue
des modèles du genre. Nous sommes d'accord ? Parfait. Une question
peut alors se poser : que s'est-il passé ? Ces deux aspects sont
semble-t-il passés à la moulinette... Ne soyons pas mauvaise langue
: graphiquement SoR3 s'en sort plutôt bien, malgré des couleurs
plus sombres que dans les opus précédents. Les décors sont soignés
et les personnages ont pour eux une bonne diversité de mouvements
correctement animés. Au passage, on remarquera que, hormis quelques
petits nouveaux, nos adversaires sont strictement les mêmes depuis
le premier épisode. Une repompe qui finit par agacer plus qu'autre
chose le fan avide de nouveauté. Le problème majeur de cet opus est
sans doute le peu de cohérence entre ses différents stages.
Là où
les deux premiers opus de la trilogie nous proposaient de parcourir
les rues de la ville jusqu'à atteindre le repère du boss final, cet
épisode s'emmêle un peu. D'abord sur le port, puis dans une
discothèque, notre héros se rendra ensuite sur un chantier, puis
descendra sous terre jusqu'à un temple asiatique. Si chaque niveau
est introduit par une petite saynète plutôt agréable visant à
développer le scénario, on ne peut que rester dubitatif face à
cette progression un brin anarchique.
Si seulement ces menus défauts étaient
les seuls du titre, on pourrait sans doute passer outre. Oui mais
voilà, nous arrivons au gros point noir du jeu, qui fit pourtant
jadis la renommée de ses prédécesseurs : la musique. Pourquoi,
monsieur Koshiro, pourquoi ? On sent la volonté d'utiliser au
maximum les capacités de la console de Sega, mais les mélodies
entraînantes des deux premiers Streets of Rage sont aux abonnés
absents, remplacées par une sorte de bouillie de bruits
électroniques particulièrement indigeste. On en viendrait presque à
se demander si certains thèmes ne sont pas en fait des bugs de son
de la machine, c'est dire. Difficile d'apprécier l'ambiance du titre
avec des mélodies de si piètre qualité, et ce ne sont pas les cris
digitalisés, repris de l'épisode 2, qui contribueront à faire de
Streets of Rage 3 une expérience sonore satisfaisante. Cette
appréciation un peu rude est certes tout à fait subjective, mais
semble symptomatique du grand problème de Streets of Rage 3 : à
vouloir surpasser à tout prix ses aînés, le jeu de Sega finit par
décevoir. La réutilisation à outrance de recettes éculées
couplée à une ambiance plus aussi maîtrisée qu'auparavant donnent
l'impression que le jeu cherche son style sans jamais le trouver
complètement. Un peu vieillot, sans surprise, mais toujours agréable
à pratiquer, Streets of Rage 3 sonne le glas de la série d'une
manière assez triste pour le fan, qui aurait à coup sûr souhaité
une meilleure conclusion aux aventures d'Axel, Blaze et des autres.
Les + : Un
gameplay efficace qui a fait ses preuves
Des cinématiques
agréables
Les - :
Musique détestable
Cheminement
étrange
Nouveautés
proches du zéro absolu
Conclusion : Sans être une
réussite comme le furent ses grands frères, Streets of Rage 3 reste
un beat'em all correct de la Megadrive. Le gameplay semble avoir
trouvé son aboutissement et ses limites, mais l'ambiance a ce
je-ne-sais-quoi de déplaisant, qui pousse finalement à préférer
retourner sur l'excellent Streets of Rage 2. A conseiller aux joueurs
en manque de tatane avant tout, les autres ont beaucoup d'autres
titres bien plus intéressants à essayer.
Note : B
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