Au rayon des mariages heureux dans le petit monde des jeux vidéo, on retrouve le mélange entre les FPS et les RPG. Ces deux genres bien distincts ont su offrir, à plusieurs reprises, des titres mémorables tels que Bioshock ou Borderlands. Cependant, bien des années avant ces jeux, on trouvait déjà un fier représentant du genre, une expérience des plus immersives qui avait propulsé son créateur, Warren Spector, parmi les grands noms du jeu vidéo. En effet, Deus Ex avait séduit par son ambiance cyberpunk et sa liberté d'action innovants. À l'inverse, sa suite avait déçu à tel point que l'on croyait la licence perdue à jamais. Que nenni, puisqu'est arrivé en août dernier un nouvel épisode, intitulé Deus Ex : Human Revolution ! La série revient-elle en force ? C'est l'heure du test !
Deus Ex : Human Revolution nous emmène en 2027, soit quelques années avant les évènements des titres précédents. On incarne Adam Jensen, un ancien flic engagé pour assurer la sécurité de la toute-puissante entreprise Sarif Industries, spécialisée dans l'amplification humaine. À base d'implants et d'organes robotiques, la société propose à l'être humain de devenir plus fort, plus résistant, plus intelligent... Lors d'une attaque dans les locaux de Sarif, Adam est sérieusement amoché et laissé pour mort. Il ne doit sa survie qu'à la pose d'augmentations sur la quasi-totalité de son corps, qui lui confèrent contre son gré de grandes capacités. Remis sur pied, Adam devra se battre pour faire la lumière sur cette affaire et se venger du groupe terroriste responsable de l'attaque...
Le scénario semble assez conventionnel, mais que l'on ne s'y trompe pas, il se montre maîtrisé et réserve son lot de mystères et de rebondissements. Mais plus encore que le scénario, c'est le background de Deus Ex qui force l'admiration : incroyablement riche, il nous propose de découvrir une époque futuriste marquée par l'amplification qui, loin de servir la cause humaine, crée de nombreuses disparités entre les hommes. L'écart se creuse davantage entre les riches, capables de s'augmenter, et les pauvres, condamnés à n'être « que » des personnes normales. Le climat de tension qui règne, parfaitement mis en scène dans l'un des teasers du jeu, nous immerge efficacement dans l'univers de Deus Ex. De plus, et l'on s'en rend compte en fouillant dans les divers livres électroniques et ordinateurs disséminés un peu partout, les auteurs proposent énormément d'informations, allant des grandes pages de l'Histoire aux relations entre les employés d'une société. Des détails pas toujours intéressants ou utiles, mais qui contribuent à nous plonger dans un futur des plus tourmentés, aux portes de la guerre civile.
Tout comme son illustre ancêtre, Deus Ex HR prend la forme d'un FPS dont le gameplay ne devrait pas dérouter les habitués de genre. Jensen aura à sa disposition un arsenal complet, comprenant pistolets, armes lourdes, mitrailleuses, mais également des armes conçues pour l'infiltration discrète, feature principale de la série. On trouvera par exemple un fusil à fléchettes tranquillisantes ou encore un petit taser. Toutes les armes peuvent être améliorées grâce à des kits que l'on trouvera de ci de là, contenant des silencieux, chargeurs et autres viseurs lasers. Bien que la majorité du jeu se déroule à la première personne, le joueur aura parfois droit à une à la troisième personne lorsqu'Adam est à couvert. Ce qui risque de se produire souvent, l'infiltration étant vivement conseillée ! Foncer dans le tas n'est pas forcément la meilleure solution, bien que le jeu autorise toutes sortes d'approches.
Faisant parfaitement honneur à ce qu'avait su instaurer le premier épisode de la série, ce nouvel opus propose une grande liberté d'action et d'interaction avec l'environnement. Par exemple, pour entrer dans un club privé, Adam peut au choix récupérer une carte d'accès, assommer le videur, chercher un passage derrière le bâtiment ou encore passer par les égouts ! Chacun pourra remplir ses objectifs à sa manière, misant soit sur l'infiltration, soit sur la manière forte. Vaut-il mieux chercher dans un carnet électronique le code d'accès de la porte, ou pirater le code d'accès via un mini-jeu sympathique alliant réflexion et réflexes ? Régulièrement, les dialogues nous laisseront plusieurs possibilités de réponse. Dédain, froideur, compréhension, mensonge, il faudra parfois jouer habilement des mots pour convaincre notre interlocuteur. De plus, les choix que fera le joueur pourront avoir des répercussions sur la suite des évènements, pour aboutir à plusieurs fins différentes.
Au cours de son périple, Adam voyagera à travers le monde, et visitera les villes de Detroit et Hengsha, à l'ambiance travaillée. Si le terrain de jeu n'est ni ouvert ni particulièrement vaste en termes de superficie, il regorge de passages divers et variés, d'immeubles à explorer, de ruelles à infiltrer, et surtout de quêtes secondaires. Si elles ne sont pas excessivement nombreuses, elles sont en revanche bien travaillées et permettent d'en apprendre plus sur l'univers que nous entoure, ses gangs de caïds augmentés, ses politiciens véreux... Des parenthèses dans l'aventure qui, hélas, n'apportent pas de réelle diversité. Et on touche là le gros défaut du soft : sa répétitivité. Malgré une liberté d'action réjouissante, le jeu peine à renouveler son gameplay, et on se prend à répéter encore et encore les mêmes actions : avancer dans l'ombre en éliminant discrètement quelques gardes, pirater un code d'accès, passer dans un conduit d'aération, et recommencer. Tout comme on aurait souhaité davantage de diversité, on peut se plaindre de l'IA des ennemis, tantôt aiguisée, tantôt ridicule. Exemple simple : tout en sachant qu'Adam se trouve accroupi dans le conduit d'aération tout proche, aucun adversaire n'ira le poursuivre et préfèrera rester debout, pointant son arme sur la dernière position connue de notre héros. Il nous suffira alors de rester immobile une petite minute pour que les gardes reprennent leurs rondes...
Les actions de Jensen lui rapporteront un peu d'argent, utile quand il s'agira d'acheter des armes ou de soudoyer un PNJ, mais également de l'expérience. Car Deus Ex est un RPG autant qu'il est un FPS : les points de compétence glanés nous permettront d'acheter diverses améliorations des parties robotiques de Jensen, permettant là encore d'affiner notre style de jeu. Certains préfèreront améliorer la résistance et la puissance d'attaque d'Adam, tandis que d'autres se tourneront vers l'invisibilité, la vue à travers les murs et la maîtrise du piratage. Bien des caractéristiques sont disponibles, et poussent à recommencer l'aventure en choisissant une autre voie. Une aventure d'une durée tout à fait correcte d'ailleurs, surtout si l'on prend la peine de s'intéresser au background du jeu.
Concernant l'aspect graphique, on peut émettre quelques remarques sur ce Deus Ex. La technique est légèrement décevante, la qualité de certaines textures laissant parfois à désirer. Mais le titre compense ces quelques carences par une esthétique de haute volée, surtout dans les villes proposant leur lot de bâtiments futuristes et de jeux de lumières. On éprouve un réel plaisir à naviguer entre les différents quartiers, passant d'une rue commerçante à une pauvre ruelle malfamée. Deus Ex HR s'appuie également sur le charisme d'Adam Jensen, diablement classe tant par son look (qui ne manquera pas de rappeler Neo, le héros de Matrix) que par ses mouvements au corps à corps. Le soft a pour lui une sympathique bande-son qui, à défaut de vraiment marquer, pose avec succès l'ambiance d'un futur tourmenté, où la technologie prend le pas sur l'humanité. Par moments, on reconnaîtra des sonorités semblables à un Mirror's Edge, qui lui aussi proposait aux joueurs un futur malsain. Le titre est correctement doublé en français, et propose des dialogues bien construits (notamment grâce aux choix multiples). On pourra entendre un punk anti-augmentations nous insulter, ou un civil nous demander de ranger notre arme. Ces quelques phrases lancées à Adam tandis qu'il se promène renforcent elles aussi l'ambiance du jeu.
Voilà qui conclut ce test de Deus Ex : Human Revolution, qui remet avec succès la célèbre licence sur le devant de la scène. Les joueurs qui ont traîné leurs guêtres sur le premier opus retrouveront avec plaisir les spécificités de la série, tandis que les néophytes savoureront ce mélange réussi entre FPS et RPG, un genre qui depuis quelques années apporte son lot de satisfaction. Certes, le titre est très répétitif et pas toujours très fin, mais il a pour lui un univers captivant qui comblera les amateurs de cyberpunk et un gameplay laissant le joueur suffisamment libre de ses choix pour qu'il ait envie d'explorer les nombreuses voies qui lui sont proposées. Voilà qui laisse présager de bonnes choses quant à l'avenir de la franchise Deus Ex !
Ma note : 16/20
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