[Test] God of War III





Alors qu’elle approche à grands pas de son quinzième anniversaire et qu’un opus dantesque vient de la remettre sur le devant de la scène, la saga God of War m’était totalement inconnue jusqu’à ces derniers jours. Non pas que je n’aie jamais entendu parler du musculeux Kratos, ni des critiques élogieuses faites à chacune de ses aventures, mais je n’avais pas encore eu le plaisir de m’y atteler. Il suffira finalement que le remaster du troisième épisode soit offert sur PS4 pour que j’entre, à mon tour, dans la légende du Fantôme de Sparte. Clairement plus marqué par cette odyssée que je ne l’aurais imaginé, un QTE réussi m’aura fait allumer mon traitement de texte pour vous livrer quelques impressions sur un jeu pas si frais que ça (le bougre est sorti en 2010 après tout), mais beaucoup trop représentatif de son époque pour ne pas en être considéré comme le point culminant, contemplant la concurrence depuis les sommets de l’Olympe.



In medias res

C’est d’ailleurs là que démarre l’aventure, sans cérémonie, et à l’exact instant où se terminait God of War II. Propulsé en pleine Titanomachie, Kratos se lance à l’assaut de l’Olympe juché sur les Titans, bien déterminé à accomplir sa vengeance sur les Dieux, Zeus en tête. Rares sont les introductions à avoir l’air de combats finaux, c’est pourtant le pari réjouissant fait par GoW III. À peine les bases du tutoriel posées, le jeu montre qu’il ne fera pas dans la demi-mesure, et que le gigantisme sera le maître mot. Il n’en fallait pas moins pour représenter toute l’intensité des combats à venir, Kratos ayant maille à partir avec des adversaires aussi illustres que Poséidon, Hermès ou Hercule. 




Ces affrontements rendus ultra-cinématiques à grands renforts de Quick Time Events ne constituent néanmoins pas le coeur du jeu, qui reprend les codes bien populaires à l’époque du beat’em up 3D mâtiné d’un soupçon d’énigmes et de plate-formes. Un genre duquel je ne suis pourtant pas coutumier, et dont ce GoW utilise les ressorts à la perfection. Alors que les combos à rallonge me révulsent, il opte pour des combinaisons de touches plutôt simples qui déclenchent des attaques impressionnantes. Alors que j’avais peur qu’il traîne en longueur par moments, il a le bon goût de ne pas s’attarder trop longtemps dans chacune des zones traversées, au profit d’un vrai rythme, soutenu sans être trop haletant, en un mot comme en cent : maîtrisé. Un bestiaire bien senti quoiqu’un peu étroit et des exécutions toujours plus sanglantes font à chaque combat la démonstrations des capacités surhumaines du dieu de la guerre, bien aidé par un arsenal varié dont on augmentera le niveau via des orbes à amasser, pour toujours plus de puissance et de coups spéciaux. Tel un petit Megaman antique, Kratos viendra récupérer les armes et attributs les plus fameux de ses adversaires, des Bottes d’Hermès aux Faux d’Hadès. Les utiliser par la suite est évidemment un plaisir immense venant accentuer le sentiment de pouvoir que le jeu tient à nous faire ressentir de bout en bout.



Le fait que God of War brille par ses phases de beat’em up n’est pas une surprise, et si leur gameplay n’étonne plus vraiment c’est parce qu’il est ici à son apogée en terme de possibilités et d’accessibilité. La refonte opérée dans l’épisode sorti cette année est probablement liée au fait qu’il aurait été délicat d’améliorer cette formule qui fonctionne déjà si bien. Là où cette aventure de Kratos est parvenue à me surprendre, c’est plutôt sur tous ses à-côtés qui posent le rythme du jeu. Sans que l’on puisse parler de donjons, certains chapitres sont l’occasion d’apporter un brin de réflexion, des énigmes jamais bien difficiles mais qui démontrent un certain savoir-faire en la matière (à l’exception notable d’une grotesque énigme à base de rythm game venant démolir à grands coups de pieds la diégèse du jeu). Si l’on en sort assez vite pour retourner à la castagne de créatures mythologiques, ces phases sont autant de respirations agréables qui donnent plus de profondeur au titre que je ne lui en aurais prêté.


Brutales Légendes



Hormis un gameplay bien rodé, pour ne pas dire colossal (vous l’avez ?), la série est surtout connue pour son univers ancré des deux pieds dans la mythologie grecque, l’une des plus fascinantes qui soit. Avec quelques raccourcis mais surtout un attachement à caser le plus de références possible, God of War III nous offre le terrain de jeu le plus divin de sa génération en nous proposant de détruire l’Olympe et de massacrer ses plus illustres habitants. Comment ne pas se laisser envoûter à l’idée de devenir acteur du conflit qui oppose les Titans aux Dieux, et de parcourir les lieux les plus fameux des légendes antiques ? 
On ira ainsi défier Hadès aux enfers, en finir avec Cronos dans les terres désolées du Tartare, ou parcourir le Labyrinthe sous les yeux de son créateur fou, Dédale. L’ensemble est servi par une direction artistique notablement inspirée donnant à tout ce petit monde une force évocatrice puissante, et aux divinités des apparences marquantes. On fait face ici à un chef d’oeuvre de design inattendu en ce qui me concerne, et dont chaque nouvel élément est une nouvelle occasion d’être ébahi. Si le scénario en lui-même n’est pas inoubliable et que la fin du jeu manque d’impact, cette immersion au coeur de légendes que l’on ne pouvait que s’imaginer jusqu’alors est le point fort qui m’a fait prendre autant de plaisir dans un genre que j’exècre. Si cela avait été un des travaux d’Hercule, pas sûr qu’il y serait parvenu : Santa Monica Studio l’a fait.


Une antiquité très 2000s


Manette en main, ce God of War m’a également laissé songeur quant au fait qu’il est un pur produit de son temps, et que la presque décennie qui nous en sépare a vu naître de profonds changements dans la façon de concevoir et rythmer un jeu. Nous sommes tellement abreuvés de mondes ouverts toujours plus gargantuesques que le découpage pourtant simple des aventures de Kratos, à savoir une progression linéaire dans un niveau suivie d’un combat contre un boss, semble presque exotique dans un jeu de son envergure en 2018. Certaines phases de vol ou de course contre l’effritement du décor ravivent notamment des souvenirs presque rétro. C’est une sensation difficile à définir, mais il m’est souvent arrivé de me dire que telle idée ou telle façon de faire n’aurait plus sa place dans un jeu contemporain, alors qu’elles constituaient la norme il y a encore dix ans. Le jeu ne s’embarrasse pas des questions de design qui allaient petit à petit uniformiser la plupart des triple A, et préfère synthétiser les meilleures idées de son temps. Comme une grande fête de famille où l’on croiserait pêle mêle Prince of Persia, Jak & Daxter, Devil May Cry ou encore Shadow of the Colossus.

GoW3 est à mes yeux une sorte de baroud d’honneur d’une ère née sur PS2 et dont les derniers coups d’éclat ont eu lieu sur PS3. En ayant opté pour un open world au goût de son époque, le nouvel épisode de la série confirme que l’on assiste avec le troisième opus à la fin d’un chapitre non seulement de la saga, mais aussi du jeu vidéo. Cela fait du titre de Santa Monica plus qu’un excellent jeu, il est aussi une inestimable pilule de rappel pour qui voudrait retrouver un feeling oublié. La conclusion est facile : au royaume du beat’em up en 3D, God of War 3 fait figure de légende et a toutes les armes pour figurer pour longtemps au panthéon du jeu vidéo.

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